Extrait d’un article paru dans L’Usine Nouvelle (texte intégral réservé aux abonnés) :
Quel meilleur moyen pour réconcilier capital et travail que de faire de ses salariés ses actionnaires ? En plus de doter ceux-ci de nouveaux pouvoirs, cette formule inaugure une autre forme de gouvernance.
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« Le salarié actionnaire n’est pas un spéculateur qui cherche à tout prix à faire une plus-value en cédant ses titres au plus offrant. Il ne veut pas obérer l’avenir de l’entreprise pour des résultats financiers à court terme », estime Patrice Brunet, président de l’Adeas, l’association qui regroupe les salariés actionnaires d’Orange. De même, selon Laurence Coin d’Arkema : « Les salariés constituent un actionnariat fiable. Ils conservent leurs actions plus de cinq ans. »
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La contrepartie de leur risque, c’est un pouvoir sur la gouvernance des entreprises. Être actionnaire donne des droits aux salariés qui sont propriétaires d’une partie de l’entreprise et ont donc voix au chapitre. Pour soutenir ou contester le management, d’autant que « ce sont des actionnaires qui connaissent l’entreprise de l’intérieur », remarque Philippe Lepinay, le président de la Fédération des associations d’actionnaires salariés. Ce droit a longtemps été théorique, les associations d’actionnaires salariés ayant « des affinités électives avec les directions, pour ne pas dire plus », comme l’explique un expert. Deux affaires récentes témoignent d’un changement. La première chez Renault : le 3 mai, quatre salariés actionnaires ont porté plainte pour abus de bien social afin d’élucider l’origine des fonds qui ont servi à gérer l’affaire des faux-espions de 2011. La seconde chez Orange où, si l’action n’est pas judiciaire, la critique n’en est pas moins radicale. Elle porte sur la politique de dividendes de l’entreprise : les salariés proposent un dividende de 1 euro contre celui de la direction à 1,40 euro, estimant que le résultat doit être investi en R et D pour les technologies d’avenir. La prochaine assemblée générale des actionnaires de l’opérateur se prononcera le 5 juin sur cette résolution. « C’est une première », se félicite Patrice Brunet. Qu’ils gagnent ou pas, les salariés actionnaires auront pu faire entendre leurs voix et obliger les uns et les autres à prendre parti. Ces deux cas pourraient faire école, estime Xavier Hollandts. Et ce, sur deux sujets qui, dans un contexte de modération salariale, posent question : le montant des dividendes et les rémunérations des dirigeants. La révolution silencieuse pourrait s’avérer pétaradante…